Aller au contenu

Henri SALVADOR

Publié le 25 septembre 2016, par Charles-Erik Labadille
Henri Salvador
Henri Salvador

S’il ne fallait se souvenir que de « Zorro est arrivé », « Minnie petite souris », « Juanita Banana »… et autres titres à la philosophie improbable interprétés par Henri Salvador, il ne ferait certainement pas partie de cette anthologie plutôt consacrée au sourire qu’à la gaudriole. Mais, dans son vaste répertoire, il y a aussi de véritables chansons d’humour comme « Blouse du dentiste », « Qu’elle est con », « Trompette d’occasion »…, et même des ballades très intimistes comme « Le loup, la biche et le chevalier », « Sarah », « Syracuse », et bien des titres de ses derniers albums d’où s’échappent une certaine mélancolie, celle du temps qui passe, des amours qui s’en vont comme « Jardin d’hiver », « Vagabond », « Faire des ronds dans l’eau »…

Car toute sa vie, Henri va osciller entre ses talents d’amuseur au « premier degré » et son penchant pour un jazz aux harmonies en demi-teintes (« Chiche », « Tu es entrée dans mon âme »…), entre sa carrière commerciale car il faut bien vivre (carrière gérée d’une main de fer par l’une de ses épouses) et sa nature d’artiste qui ne rêve que de partager de nouvelles aventures avec d’autres musiciens… C’est cette fragilité, cette incertitude entre facilité et complexité (un des « pères » de la bossa nova, du moins en France) qui rendent Henri Salvador particulièrement attachant.

Rappelons quelques points moins connus d’une carrière qui se déroule sur le long terme. En effet, le rire —et Dieu sait que celui de Salvador est connu— doit conserver puisque, né à Cayenne en 1917, il s’éteint en 2008 à l’âge de 90 ans. Tout d’abord, à seize ans, il découvre Armstrong et Ellington —« Duke, Basie, Louis » qui resteront les modèles de sa vie— et l’amènent à surfer les vagues « jazz » et « swing ». Au début de sa carrière, Henri chante en duo avec un autre Salvador, son frère André qui, pour sa part, reçoit en 1947 le grand prix du disque de l’Académie Charles-Cros. Quant à Henri, pour la petite histoire, il est engagé comme accompagnateur en 1935 par… Django Reinhardt. De 41 à 45, il rejoint l’orchestre de Ray Ventura comme guitariste-chanteur. C’est avec ce dernier qu’il enregistre certainement sa première intervention en qualité de chanteur, interprétant en 1941 le titre de Paul Misraki « Le premier rendez-vous ». On y découvre la belle voix d’un des premiers crooners français. Après une difficile rupture avec son frère qui lui propose de reprendre le duo, Henri Salvador lance sa carrière solo en 1946, connaît rapidement le succès et obtient également le prix Charles-Cros en 49. Enfin, vers la même date, il rencontre Boris Vian par l’intermédiaire du pianiste Jack Diéval. C’est surtout de 54 à la mort de Boris (59) que la collaboration Vian-Salvador est très fructueuse et inscrit de droit Henri au sein de la famille des humoristes chanteurs. Pour mémoire, rappelons les titres « C’est le be-bop », « La vie grise », « Y’a rien d’aussi beau », et les fameux « Faut rigoler » et « Blouse du dentiste ».

Puis, pendant trente années, Henri devenu un chanteur extrêmement populaire joue (un peu à contre cœur ?) le rigolo de service. En réaction, cette étiquette lui vaut une éclipse de 20 ans (80-2000) où il se voit catalogué de chanteur ringard par les jeunes générations qui font et défont les vedettes. De 2000 à 2006, c’est le grand retour du crooner intimiste avec la production d’albums très « bossa » « Chambre avec vue », « Révérence »… où l’artiste jazzy renoue avec le grand public.

« Le premier rendez-vous » (Paul Misraki), 1941

« Blouse du dentiste » (B. Vian / H. Salvador)

27 albums de 1955 à 2006

Salvador CD
Salvador CD